Hotel Pöpervagg

J'attendais des larmes du Vieux Quartier, j'attendais que la nostalgie des batisses dix fois centenaires m'étreigne le ventre. Je n'eus qu'une fade quiètude, une vague déjà-vu, une amère absence.
Les rues se ressemblaient, elles étaient mornes et ne me saluaient pas. J'avais surestimé cette ville, comment avais-je pu croire que ces amas de pierres sèches puissent se souvenir de mon nom.
Pourtant je sentais qu'il y avait encore un peu de nous, les anciens, dans cette ville, pas une statue ou une tour à notre nom. Juste quelque chose qui parlerai de nous avec des couleurs et des textures. Quelque chose qui aurait notre esprit gravé dans sa peau. Quelque chose qui devait être ici.
Soudain je le vis ce Quelque chose.
Au travers des rues étroites, une bâtisse sanglante s'exhibait avec courtoisie. Sa teinte saturée contrastait avec les barraques voisines. Un dialogue muet commença entre moi et la maison, une sorte d'intimité au milieu de la foule. Je m'approchais de ses murs, le pas hésitant, comme la première fois que l'on caresse une femme.
"Hotel Pöpervagg"
Pöpervagg ... Les Rideaux Violets en nain. Ce nom ne me disait rien, j'étais amoureux d'une belle inconnue.
Je la contemplais, muet, m'attardant sur ses vitres brisées qui pleuraient leur abandon.
Une porte de chêne.
J'entrai. Personne.
Ici j'habiterai.
Je ne la rénoverai pas, c'est tout juste si je la nettoierai, sa beauté ne doit être touchée qu'au minimum. J'ajouterai peut-être un fauteuil à l'occasion mais rien de plus.
Je la visitai.
Deux étages et un sous-sol. 17 petites chambres, autant de salle de bains, un salon, une cuisine et rien de plus. C'était un hôtel tout ce qu'il y'a de plus banal. C'est ici que je vivrai.

Quelques jours après ma singulière découverte je commençai à me sentir seul dans ma demeure. J'appris que ce vieil Orphee n'avait pas de maison, lui qui, pendant des siècles, avait vécu avec l'adoration de milliers d'elfes ne devait pas avoir l'habitude de dormir dehors. Quoi que, il avait connu lui aussi l'exil, plus court que le mien certes, mais de durée respectable. Cela étant, peut-être qu'un lit chaud et des draps propres ne le rebutteraient pas et puis, on a des choses à se dire, en 1000 ans.
D'ailleurs, tous ceux qui voudront dormir et discuter seront les bienvenus, je devrais peut-être ouvrir un bar ...

Une jeune fille aux cheveux blancs s'approcha de la batisse avec respect. Elle semblait elle aussi touchée par ce batiment. Elle hésitait sur le seuil, puis se décida, et frappa.
Elle se trouvait devant l'elfe qui porte le nom de Lépikarma.
Elle s'inclina devant lui avec respect.
-Mon nom est Morgane

"Bien le bonjour Morgane mais ne t'incline pas, les révérences m'ennuient, oui, je sais, c'est inhabituel de la part d'un elfe. Quant à mon nom, Lepi suffira, je garde l'autre pour les grandes occasions ! Mais je t'ennuie, tu cherches quelque chose peut-être ?"

"Je cherche un endroit pour manger et dormir, et j'ai cru que cet endroit était un hotel. Mais je vois à présent que je me suis trompée. A voir l'état des volets, il semble que cet endroit a été longtemps inhabité. Excusez mon erreur, je vous ai dérangé, et je vous prie de bien vouloir m'excuser pour ca aussi. Au revoir messire."dit-elle en s'inclinant de nouveau, malgré la demande de l'elfe

"Tu ne t'es pas trompée, c'est bien un hôtel et c'est bien le mien, si tu cherches un endroit où manger et dormir tu ne t'es pas trompée, il y a 16 chambre de libre et je ne les fais pas payer, je considère la compagnie de mes client comme un salaire bien suffisant, de toute façon, l'argent ne me sert à rien. Ensuite ne juge pas cet hôtel avant d'y être entrée, peut-être que tu l'apprécieras qui sait ?"

-Ainsi donc, demanda Orpheee (qui malgré ses treizes siècles possédait encore une voix chantante et légère), vous êtes une elfette ?
Quel est votre âge, si cela n'est pas indiscret ?

Morgane sursauta, n'ayant pas vu le viel elfe s'approcher. Elle rougit légèrement, avant de s'incliner avec autant de respect que pour Lepikarma. Elle baissa la tête avec solennité avant de parler d'une voix douce.
"Monsieur, je suis honorée. Mon âge doit être risible par rapport au votre, et je ne possède qu'une infime part de sagesse, contrairement à vous. J'ai maintenant 17 lunes messire."
Puis, elle se tourna vers Lepikarma
"J'accepte volontiers votre offre, si je ne vous dérange pas. Je dois vous avouer que ne pas payer m'enlève une épine du pied, car je ne suis pas en possession de beaucoup de moyen"

Bah, répliqua le vieil elfe.
Tu peux m'appeler par mon nom, tu sais !
C'est pas parce que j'ai mille ans et que j'ai côtoyé le roi Gurvillons lui même qu'il faut me prendre pour autre chose que je suis : un elfe, tout ce qu'il y a de plus normal.
En plus, j'ai une apparence juvénile, alors considère moi comme ton copain, d'accord ?

Apparement 1000 ans sans Marlab ont rendu Orphee amoureux des jeunots ... Rooh mais je te charie c'est de l'humour elfique !
Au passage si tu veux faire une petite halte chez moi, c'est gratuit je te dis !

Beldo se baladait dans les rues (c'est bête un hobbit, ça se balade alors qu'il ne sait pas pourquoi...), et vit les trois elfes... Dont une femme, à la porte d'un hôtel. "Selon moi, ça va pas être joli à voir." Et Beldo continua son chemin, comme si de rien n'était.

"Beldo est un idiot, aurait-il oublié que j'entends ce qu'il pense grâce à mes facultés télépathiques ... Enfin, l'exil m'a appris à tempérer alors ... Oh allez ! Un petit éclair dans les fesses !"

"AAAAAAAAAAAAAAAAAAAAAAAAAAAAAAARGH"

J'ai pas perdu la main ...

Joli. Mais je crois que ce n'est pas pareil que quand tu le faisais sur Bolbi...
Il y avait un je ne sais quoi de plus qui rendait la scène plus charmante...

Morgane, effarée, contemplait la scène sans comprendre ce que pouvait vraiment être ces deux elfes...

Répondant à ces pensées je lui disais simplement : "Nous sommes deux grands comiques !"

Morgane lui assena alors un sourire rayonnant, avant de rentrer dans l'hotêl.
"Où suis-je censée dormir ?"

Comme tu veux, t'as deux étages, 8 chambres pour chaque, la 17ème au rez-de-chaussée est à moi, c'est la seule que je me garde. Si tu désires la moindre chose je me ferai un plaisir de te l'offrir !

"Je n'oserai rien vous demander monseigneur. Je vous remercie pour votre hospitalité"
Morgane monta au dernier étage, posa ses affaires, et s'en alla en ville pour reprendre son exploration.

"Monseigneur ... j'ai vraiment pris un coup de vieux", pensai-je alors qu'elle partait en trotinant joyeusement.

"Tu parles", répondit Orpheee télépathiquement.
"Malgré les apparences, les gens ne nous considèrent pas autrement que comme des Seigneurs, des gens bizarres, et beaucoup nous vénèrent pour nos actions passées.
Si tu avais vu ce que pensait de moi une petite vieille, l'autre jour !"

"Pourtant j'ai pris mes précautions, j'ai changé d'apparence et de nom... Comment sont ils au courant ?

Je parie que les descendants de Bolbi n'y sont pas pour rien...

Pas toujours malin celui-la ... enfin !
On va embêter les bourgeois dans leurs belles maisons ?

"Non ! J'en ai marre de boire du thé en racontant ce qu'était Allysan de notre temps devant des spectatrices laides comme tout et extasiées à un point que s'en est horrible !

"Quand je dis embêter je veux dire... utiliser notre magie pour enlaidir leur quartier !"

"Bon. Que dirais-tu de changer toutes ces superbes ornementations en quelque chose de moins glorieux ?"